Le mardi 29 octobre 2013, la population a été appelée à témoigner sa reconnaissance envers Karen Martens et son mari Franck, venus se recueillir devant la plaque apposée le 27 mars 2004, contre la stèle des Evadés de France, près de la Capitainerie du Port de Capbreton.
Karen est la nièce du lieutenant Paul Baum, victime lors du crash du B24 Liberator, abattu par la Flak allemande le 27 mars 1944 devant Capbreton.
On doit sa venue au travail de recherche de Christian Levaufre, ancien de l’aviation, résidant près de Mont-de-Marsan, qui a sollicité notre Association, afin d’entourer ce couple d’Américains et de marquer notre solidarité envers ces aviateurs qui ont donné leur vie pour que notre pays soit libre.
Nous avons bénéficié, pour que ce jour reste dans la mémoire de Karen et Franck, de la complicité effective du SIVOM qui a offert la gerbe des Capbretonnais reconnaissants et le pot qui scelle l’amitié entre nos deux peuples. Merci Monsieur Delannay.
Plaque commémorative de la journée du 27 mars 1944.
Grâce à la détermination de M. Eric Dupré, responsable du club MARS de plongée « Le mérou basque », Capbreton a vécu le 27 mars 2004 une journée qui comptera dans son histoire. En effet, sous l'impulsion de ce plongeur, de nombreuses énergies se sont mobilisées afin de faire connaître un fait de guerre ignoré du grand public : le crash d'un bombardier B24 américain, à un mile devant la plage de Capbreton, faisant six victimes, quatre aviateurs étant sauvés par les pêcheurs locaux.
Rappel des faits :
Les armées allemandes sont à la peine, que ce soit sur terre, sur mer ou dans le ciel.
Les forces alliées, voulant donner un signal fort à la Résistance française, mais aussi tromper la vigilance ennemie en faisant croire à la préparation d'un débarquement sur les côtes atlantiques, décident une attaque simultanée des bases et aéroports de ces régions. Le 20 mars 1944, la BBC distille sur ses ondes un message à l'adresse de la France combattante en ces termes : « Les violettes de Parme fleuriront ». Biarritz?Parme fait partie des objectifs.
Une semaine plus tard, le 27 mars 1944, le bombardement est effectif, et un déluge de bombes s'abat sur Saint Jean d'Angély, La Rochelle/La Leu, Chartres, Tours, Cayeux, Bordeaux/Mérignac, Cazaux, Mont?de?Marsan, Pau/Pont?Long, Biarritz, dans le cadre de la mission n° 282.
Quelques sept cent un bombardiers de l'US Air Force, B?17 ( forteresses volantes), B?24 Libérator, du 458th BG et du 466th BG de la 8ème Force aérienne des Etats-Unis, appuyés par neuf cent soixante chasseurs P?38s, P?47s, P?51s participent à l'opération.
Au retour, 3 B?17, 5 B?24, 2 P?38, 5 P?47 et 3 P?51 seront portés manquants, ainsi que 71 aviateurs. Il faudra déplorer la mort de quatre vingt dix civils à Biarritz, quarante et un à Anglet, douze à Mont de Marsan, trois à Cazaux, alors qu'à Pau, compte tenu de l'éloignement de l'aéroport, il n'y aura pas de victimes.
Le B 24 de Capbreton :
Parmi les avions qui ne rentrent pas à leur base, en Angleterre, figure le bombardier B?24 42?109836 matricule 3590, tombé à Capbreton. Il appartient au 66th escadron du 44th BG ( Bombarder Group) , basé à Shipdam, station n°15, depuis octobre 1942, commandé par le colonel Frédérik R.Dent.
L'équipage est composé :
* du pilote, le 1st lieutenant Richard E.Harleman, matricule 0.799767, originaire de Pensylvanie.
*du co-pilote, le 1st lieutenant Johnson Melvin, matricule 0.749695, originaire de l'Utah.
*du 1st lieutenant navigateur William Cobane, matricule 0.735857, originaire du Michigan.
*du 2th lieutenant bombardier Paul Baum, matricule 0.685420, originaire de l'Ohio.
*du Staff sergeant radio opérateur Lawyer Donald, matricule 33244873, originaire de Pensylvanie.
*du Staff sergeant canonnier de la tourelle ventrale Wood Fred D, matricule 13119193, originaire de Virginie.
*du Staff sergeant James Crane, canonnier droit.
*du sergeant Joseph G Benoit, canonnier gauche.
*du sergeant Lee H Fields, canonnier de la tourelle supérieure
*du sergeant John Pétricevich, canonnier de queue.
Le B 24 et son équipage, participent avec succès au bombardement de la base de Mont de Marsan, depuis une altitude de 10.000 pieds. Malheureusement, après s'être délesté de ses bombes, notre appareil est atteint, ainsi qu'un autre B?24, par les tirs nourris de la FLAK ( défense anti-aérienne allemande). L'extrémité d'une aile est emportée, et le moteur n°4 prend feu. Il est 14 h 38. Richard E Harleman le pilote se voyant dans l'impossibilité de rejoindre sa base anglaise, décide de gagner l'Espagne, plus proche, et neutre. Il abandonne sa formation, tout en réduisant son altitude, et quand il atteint la mer au niveau de Capbreton, il est si bas qu'il devient une proie facile pour les canons de 75mm de la FLAK côtière installée dans les blockaus.
Durement touché, l'appareil s'écrase à deux miles et demi du rivage. Le contact avec l'eau est si violent que le B 24 se casse en deux, éjectant la moitié des occupants, surtout les canonniers. Ainsi, les sergeants James Crane, Lee H Fields, John Pétricevich, Joseph G Benoit (dont l'origine est française) et le lieutenant Paul F Baum, les cinq plus ou moins blessés, peuvent encore espérer. Les navigants, quant à eux sombrent avec la carlingue de l'avion. Voilà ce que l'on peut dire, après le magnifique travail de recherche effectué par Eric Dupré, pour la partie militaire officielle. Reste à connaître le rôle joué ce 27 mars 1944, par les intervenants capbretonnais.
Intervention des pêcheurs capbretonnais :
Il faut admettre que si les informations recueillies sont assez abondantes, il faut être très prudent quant à leur exploitation. En effet, les nombreux récits ne concordent pas toujours. Les interprétations des faits nous prouvent que l'imagination des Capbretonnais a le mérite d'avoir bien fonctionné. Les acteurs de ce drame en mer ont tous disparu. Ne subsiste que quelques témoins visuels à terre, comme Thérèse Lacaule, la soeur des fameux pêcheurs Jeannot et Jules. Elle raconte comment son père a récupéré une échelle, pour transporter les deux aviateurs blessés depuis le bateau « Intrépide » d'Eugène Lasmaries, qui les avait repêchés, jusqu'au véhicule des Allemands qui les attendaient sur le quai.
On sait aussi, que le « Laure Ja », appartenant à Louis Cazobon, dont le nouveau patron depuis le 23 mars 1944 s'appelle Henri Dupey ( père de Jean, Georges et Roger), est sur les lieux. A son bord, il y a aussi Louis Hourcade, et, peut-être, Jacques Lafitte qui, quelques années plus tard, contera l'événement dans le manuscrit d'un ouvrage en cours, dont Maurice Carrière dans l' «Histoire de Capbreton», semble s'être inspiré. Mais, contrairement à ce que mentionne Carrière, il n'y a pas sept rescapés, et encore moins cinq sur le « Laure Ja ».
En effet, et cela est confirmé par Joseph Benoit, seul survivant connu , le sergeant Pétricevich ne s'étant pas manifesté depuis sa déportation en Allemagne, on ignore s'il est toujours en vie ou bien décédé. Il n'y avait que quatre rescapés. Un cinquième, Paul F. Baum, nagea bien quelques instants auprès de Joseph Benoit, mais, trop atteint, il coula rapidement. La mer rejeta son cadavre le lendemain sur la plage, où les Allemands le ramassèrent. Il comptait sept impacts de balles. Sa dépouille repose au cimetière américain de Draguignan.
Ce sont donc quatre survivants, que les Capbretonnais ramènent à terre, à bord de leurs frêles embarcations. L' « Intrépide » a un moteur Couach de 7.5 CV, le « Laure?Ja » un moteur Eyquem de 15 CV. Cela suffit pour rendre espoir à John Pétricevich, légèrement blessé, tout comme James Crane, alors que Lee Fields (brûlé) et Joseph Benoit (jambe cassée) sont plus touchés, mais tous vivants. Comme il fallait s'en douter, le comité d'accueil est bien là. Les Allemands prennent possession des rescapés, pour les conduire à Hossegor, dans la villa « Adalga », route du Golf, appartenant au Baron Le Lasseur, et transformée en clinique pour le compte du docteur Touya jusqu'en août 1944, afin de leur donner les premiers soins, puis à l'hôpital de Dax. Le moins blessé, Pétricevich, est dirigé en tant que prisonnier vers l'Allemagne. Benoit voit sa jambe cassée plâtrée par un médecin allemand, dans un hôpital parisien où il a été envoyé, avant de rejoindre les hôpitaux allemands de Obermasfeld, puis Meinningen. Ensuite c'est au Stalag Luft IV qu'il sera affecté, et que les Russes le libéreront, lui permettant de retrouver son compagnon d'infortune Lee Fields, avec lequel il sera rapatrié aux Etats-Unis.
Voilà quel fut le rôle de nos braves pêcheurs capbretonnais, et qui justifie, qu'en 2004, une journée pour se souvenir, soit marquée par l'apposition d'une plaque commémorative, à la capitainerie du port.
Comment en est?on arrivé là ? Le plongeon dans l'Histoire de M. Eric Dupré.
Cet animateur de l'école de plongée subaquatique « Le Mérou basque », à qui revient l'initiative de cette commémoration, s'est livré à un travail de recherche concernant ce drame, en relation directe avec son activité. Ce passionné de plongée, au travers de la Cellule de Recherche des Epaves de Gascogne, est en quête de nouveaux sites d'explorations, et donc de ces drames qui jalonnent notre Histoire régionale.
Ainsi, il prit connaissance du crash du B 24, et se rendit sur les lieux. Lieux qui avaient été identifiés, en 1974, à la faveur d'un incident matériel de pêche, le chalut du bateau de Pantxoa Gauyat étant coincé dans une croche inconnue. Il est fait appel à la vedette de gendarmerie de Capbreton, et plus précisément, aux plongeurs Marc Gagino et François Frantz. Ceux?ci, rapidement sur zone, équipés de leurs bouteilles, se laissent glisser le long des câbles d'acier qui tractent la poche du chalut, jusqu'à cette dernière. Là, étonnement, ils découvrent l'aile d'un avion, avec son train d'atterrissage et le chalut accroché à celui-ci, à une profondeur de 36 mètres. Plus loin, gît une partie de la carlingue. Les indices recueillis montrent qu'il s'agit bel et bien, de l'avion abattu par les Allemands le 27 mars 1944. Pour eux, la découverte est de taille.
Renseignements pris, un ancien pêcheur capbretonnais Claude Debert m'a confié qu'en 1969, alors qu'il était embarqué sur le chalutier « Aigle des mers », il avait vécu le même incident, et avait été appelé à plonger avec un autre marin, Pantxoa Lafitte pour dégager le chalut immobilisé à la même profondeur. Il aurait donc fait la même découverte, une partie de la carlingue étant encore visible et infestée de congres et homards (selon ses dires). Il avait cru d'abord apercevoir l'épave d'un sous-marin, en voyant la forme ensablée, avant d'identifier ce qui bloquait le chalut : un moteur sur un bout d'aile. Seule suite, l'inscription de l'épave sur le livre de bord. Il faut dire que dans les années 1960, les armateurs faisaient faire des stages de plongée aux jeunes marins pour justement solutionner ces problèmes de croches, mais aussi pour remplacer les anodes sur les coques métalliques des bateaux, tous les 25 jours à leur retour de Dakar. C'est comme cela que Claude Debert, son diplôme en poche, a pu plonger avec ses bouteilles sur l'épave du B24.
9 h30. Une certaine effervescence règne sur le port. Des gens se démènent dans tous les sens, les uns en civil, d'autres en tenue, mais rien de bien précis. En fait, l'organisation de cette journée s'est négociée par téléphone, et les intervenants ne se connaissent pas. Heureusement que le site est modeste et la Capitainerie bien identifiable. En en faisant le tour, les participants ont tôt fait de se croiser donc de se retrouver.
Une fois tout ce beau monde réuni, direction le ponton B , le ponton d'accueil du port, sous la houlette du maître de cérémonie, en l'occurrence Philippe Bouvet président de l'Union Nautique du Port de Capbreton ( UNPC). Ce dernier a sollicité ses adhérents pour la mise à disposition de belles unités afin d'embarquer les personnalités pour la traditionnelle sortie en mer, et le non moins rituel jet de la gerbe de fleurs en mémoire des marins disparus.
Le « Titus » de Jean.Pierre Lefort, le « Patacayre » de Jean Lavignasse ( le doyen), l' « Oméga » de Jean Claude Bardet, le « Lagagnon » de Louis Tauzin, le « Kymathéa » de Willy Bordessoulle, le « Narval » de Jean Claude Lafourcade, et mon « Friendship » ont répondu présent pour cette noble cause. La SNSM et le « Saint-Nicolas » bouclant le chapitre embarcations.
Le « Titus »(J-P Lefort) fait office de navire amiral. Montent à son bord, toujours drivés par Philippe Bouvet, le colonel Clément (officier de réserve adjoint base aérienne de Mont de Marsan), les lieutenants de vaisseau Gervers et Vinel, pour la partie militaire. Côté civil, on note la présence du député maire Jean-Pierre Dufau, des adjoints Jean Jacques Anglade et Jean Claude Puyau, d'Eric Dupré l'instigateur de cette commémoration, sans oublier le « clairon » Jean José Vergés pour les sonneries officielles. Je demande à l'abbé Devert s'il désire embarquer mais il décline l'invitation doutant de sa capacité à supporter l'épreuve vu son âge.
Embarquement des personnalités
Le convoi quitte le quai, empruntant le sillage de la vedette de sauvetage sous un soleil radieux et dans un océan complaisant, pour gagner le large et le lieu du drame du 27 mars1944.
Là, les différentes unités sont conviées à former un cercle autour du « Titus »avant le traditionnel jet de la gerbe. En grand habitué, Philippe Bouvet le maître de cérémonie dirige la manoeuvre. José porte alors le clairon à ses lèvres pour la sonnerie aux morts avec le salut et l'instant de recueillement. Moment intense où vous reviennent en mémoire ces épisodes dramatiques de notre histoire et où chacun se doit d'honorer le sacrifice des anciens.
Gerbe pour les disparus
Retour sans histoires, chacun pouvant contempler la côte sous son aspect printanier dont seules les cannes des pêcheurs viennent rompre par endroits l'inexorable monotonie.
N'ayant aucune victime de mal de mer à déplorer, le protocole prévoit de poursuivre à terre le programme que l'on découvre et met en oeuvre au coup par coup. Ainsi, nous sommes invités à nous rassembler autour de la stèle aux évadés de France, proche de la Capitainerie, sur laquelle sera apposée de façon provisoire la plaque commémorative de la journée du 27 mars 1944. La plaque aura sa place définitive sur la nouvelle Capitainerie dont les travaux commenceront fin 2004.
Le commandant Fiévet prend le relais pour la partie militaire, aidé en cela par Bernard Peyrucain, président de la section locale des anciens combattants. Huit porte-drapeaux sont là, impassibles, attendant que les diverses personnalités qui étaient en mer prennent place. D'autres, telles que Pierre Noël, président de l'Ammac, Michel Grançon des anciens combattants, Jean Marc Barrère, David et Sébastien Wadoux, Patrick Billy, Dominique Contis et Fabrice Dumont , pour la SNSM. De nombreux conseillers municipaux apportent leur caution à cet événement. On note la présence de Roger et Jean Dupey, fils de Henry Dupey , patron depuis quatre jours seulement du « Laure-Ja » au moment des faits qui recueillit deux des quatre aviateurs rescapés. Signalons aussi Thérèse Lacaule qui assista en compagnie de son père au débarquement des deux aviateurs ramenés par l' « Intrépide ».
Historique du 27 mars 1944 par Jean Lartigue
J'avais été sollicité par l'instigateur de cette journée pour faire un bref historique de ce qui s'était passé au large de Capbreton ce 27 mars 1944. Je m'acquitte donc de ce rappel à l'adresse du public, en gommant au passage quelques erreurs colportées depuis lors quant au déroulement des faits, enlevant du piment à certaines interprétations. Rigueur historique oblige !
Puis le commandant Fiévet reprend les choses en mains pour rendre les honneurs militaires. La plaque commémorative est dévoilée par le gendarme Marc Gagino, revenu spécialement de Dakar, et qui avait eu l'occasion de plonger sur l'épave de l'avion B24, le filet d'un chalutier s'étant pris dessus. L'abbé Michel Devert peut alors procéder à sa bénédiction.
L'abbé Michel Devert et Marc Gagino
Nouveau dépôt de gerbe par le député maire et le commandant de la base de Mont de Marsan. Moment d'intense émotion et de recueillement alors que les drapeaux s'inclinent pour saluer la mémoire des disparus. Aux mâts, les drapeaux américains, français et européens battent à l'unisson sous l'action conjuguée du vent d'est et celui de l'Histoire.
J-P Dufau et le colonel Clément vont déposer la gerbe
Salut des drapeaux
La conclusion revient à Jean Pierre Dufau qui rappelle qu'en ces périodes difficiles de tension, les Etats Unis n'en demeurent pas moins nos alliés privilégiés, et nos deux peuples, amis.
Jean-Pierre Dufau
Jean Lartigue
Monsieur Michel Mallet s'est déplacé à Draguignan où se trouve la tombe du lieutenant Paul E. Baum et il a ramené les photos suivantes :